Ils ne laissent personne indifférent. Beaucoup de gens pensent qu'ils dépassent les bornes, qu'ils se conduisent mal, qu'ils sont mal élevés, et même qu'ils sont fous. On parle ici des amateurs de sports de Philadelphie. Lorsqu'ils se rendent encourager leur club de basket-ball, de football ou de hockey, ils le font avec passion. Ils ont leur manière bien à eux de manifester leurs sentiments, que ceux-ci soient positifs ou négatifs. On sait toujours à quoi s'en tenir avec eux. Leurs opinions sont tranchées et ils les expriment avec un sens de l'humour spécial, qui leur est propre. Pour eux, le droit de manifester est sacré. Il est inscrit dans la Constitution des États-Unis, il est un élément fondamental de la grande démocratie américaine, et les mordus de sports de Philadelphie aiment s'en prévaloir et l'exercer. Par exemple, au hockey, l'organisation des Flyers de Philadelphie, de la Ligue Nationale (NHL), est une des rares équipes à permettre à leurs féroces partisans d'amener des pancartes à l'aréna durant les matchs. Les messages inscrits sur ces cartons sont souvent "savoureux", et parfois brutaux. Ils contiennent des mots d'esprit caractéristiques des fans de la ville de l'amour fraternel. Ils traduisent l'attachement féroce des fans à leur club. Ils font partie d'une tradition qui ne ménage pas les équipes "ennemies" et leurs supporteurs. Spectateurs bruyants et pas mal dissipés, les fanatiques des Flyers ne se gênent pas pour tenter d'intimider leurs adversaires, ainsi que leurs partisans. Par leurs cris de ralliement, leurs chants partisans, de même que par leurs cartons brandis à bout de bras, et sur lesquels apparaissent des mots d'encouragement pour leurs favoris, ou des remarques cinglantes, acerbes ou humiliantes pour les opposants, les fans des Flyers cultivent le chauvinisme à un degré fort élevé. Ils ont acquis cette réputation au fil des ans, mais c'est au football, à un match des Eagles (NFL), que leur renommée a été consacrée, il y a une vingtaine d'années, quand ils se sont permis de huer...le Père Noël !
Peut-on reprocher à ces passionnés de trop aimer ou de trop encourager leurs équipes de sports professionnelles ? Remarquer que c'est aussi une arme à deux tranchants. Quand leurs favoris perdent trop fréquemment, ils manifestent aussi leur mécontentement, et ce, de façon non équivoque... Oui, ils sont exigeants et ils s'arrangent pour être entendus par les patrons de leurs clubs préférés quand les choses ne vont pas à leur goût. Ceux-ci ont tout intérêt à les écouter et à satisfaire cette clientèle qui demande rien de moins que l'excellence, de l'intensité au "travail", et un "retour" sur leurs investissements (achat de billets pour les parties, consommation des produits commerciaux du club). Payant un prix élevé pour assister aux performances de leur équipe, les gens de Philadelphie désirent un spectacle de qualité, que ce soit sur la patinoire, sur le terrain de football ou sur les courts de basket. On ne peut pas leur passer n'importe quoi sous les yeux sans qu'ils ne s'en aperçoivent sur le champ. Ainsi, le mois passé, lors du premier match hors-concours des Flyers à Philadelphie, les partisans de "l'Orange Crush" ont réagi immédiatement par des huées bien senties, quand ils ont constaté que les dirigeants du club avaient remplacé les "Ice Girls" par...des "Ice Men". En effet, pour nettoyer et entretenir la surface glacée durant les arrêts de jeu ou entre les périodes, ce sont des hommes, portant des pantalons longs et des blousons aux couleurs des Flyers, qui faisaient le boulot à la place des femmes sexy et court vêtues, qui avaient l'habitude d'accomplir ces tâches au cours des dernières années. Pour les fans des Flyers, ces jolies filles faisaient partie du "spectacle" pour lequel ils défraient des montants d'argent assez substantiels. Il n'était pas question qu'on les prive de cet important et très agréable élément du "show". Devant leurs protestations véhémentes, les dirigeants des Flyers ont fait volte face en ramenant les "Ice Girls" sur la patinoire et aux abords de l'amphithéâtre où évolue l'équipe.
Pourquoi au juste les responsables de l'organisation des Flyers avaient-ils choisi d'éliminer les "Ice Girls", qui servaient également de cheerleaders, d'hôtesses à l'accueil, de représentantes de l'équipe à des activités communautaires, ou d'agentes de vente ou de distribution de diverses marchandises ? La réponse à cette question est probablement liée à la controverse qui a éclaté au début de l'année au sujet des mauvaises conditions de travail et du traitement salarial médiocre des meneuses de claques des clubs de la Ligue Nationale de Football (NFL). J'ai d'ailleurs écrit à ce propos sur mes blogues FOOTBALL MANIA AVEC HACKSAW et CHEERLEADERS ET STARS (voir les liens dans la marge de droite). Une poursuite judiciaire pour violation des lois du travail avait été entamée par une ex-cheerleader des Raiders d'Oakland. L'affaire s'est réglée hors cours pour la somme de 1,2 million de dollars américains. Mais cette première réclamation a fait boule de neige et d'autres poursuites ont suivi dans d'autres villes. Il a suffi qu'une jeune femme courageuse ose dénoncer une situation d'exploitation et de maltraitance déplorable, pour délier la langue d'autres filles opprimées, y compris des "Ice Girls" de la NHL. Il faut mentionner que beaucoup de féministes ont depuis longtemps sonné l'alarme pour condamner le "sexisme" dont sont victimes ces mignonnes jeunes femmes qui, à leur avis, se promènent à moitié nue sur des scènes sportives, afin de satisfaire les fantasmes des bandes de voyeurs, qui les regardent souvent comme ces filles légères qu'ils peuvent admirer avidement dans des bars de danseuses nues...
Un article percutant à ce sujet a d'ailleurs paru cet été dans le magazine MOTHER JONES. On y révèle, par exemple, que des cheerleaders de la NFL doivent passer des tests qui consistent à sauter sur place et faire divers exercices pour que l'on vérifie si elles ont pris trop de poids. Assez humiliant merci ! En ce qui concerne les "Ice Girls" des Flyers, on a aussi appris qu'elles ne gagnaient que $ 50 pour une journée de travail qui s'étend sur sept heures. Lorsqu'elles distribuent des programmes ou accueillent les partisans à l'entrée de l'aréna, elles souffrent du froid et on leur interdit de revêtir des vêtements plus chauds que leur léger uniforme de fonction. Même qu'en 2012, lors des trois jours qu'ont duré le festival "Winter Classic", au cours duquel les Flyers ont joué un match à l'extérieur, les filles, toujours en petite tenue, ont dû travailler dehors alors que le mercure était descendu à 20° F. ou - 7° C.. De plus, on leur défend de manger en public malgré les heures de travail qui peuvent s'étirer longtemps. Même lorsqu'elles sont dans un restaurant ou dans un autre endroit public, en dehors de leurs heures de travail, elles doivent quitter immédiatement les lieux si un joueur des Flyers arrive ou est présent. On ne veut pas qu'il y ait des contacts, (et encore moins des liaisons amoureuses) entre les "Ice Girls" et les autres membres du personnel des Flyers. Sans doute pour éviter ce qui s'est produit à New York, quand une "Ice Girl" des Rangers a porté plainte pour harcèlement sexuel contre un membre officiel de l'organisation du club. Dans le sillon de cette affaire, les Rangers ont décidé de ne plus engager d'"Ice Girls" à partir de l'année 2007.
Que les directives de leur gérant soient claires ou sous-entendues, à cet effet, les "Ice Girls" savent qu'elles doivent s'organiser pour se faire belles avant d'accomplir leurs tâches devant les fans de l'équipe qui les emploie. Pour les soins de beauté (maquillage, coiffure, soins dentaires, etc), certaines organisations fournissent du personnel et des services à leurs "girls", alors que d'autres employeurs leur laissent ces responsabilités tout en ne les compensant pas toujours équitablement pour les frais financiers (jusqu'à $ 350 par mois) qu'elles entraînent.
Malgré ces inconvénients, la grande majorité des "Ice Girls" adorent ce qu'elles font. Elles trouvent excitant le fait d'être le centre d'attraction, lorsqu'elles sont sur la patinoire, quand elles portent les couleurs de l'équipe lors d'événements publics, ou durant des cérémonies communautaires. Plusieurs filles des Flyers ont réagi avec colère quand elles ont su que certaines de leurs consoeurs s'étaient plaintes de leur traitement aux journalistes. Surtout quand le club les a remerciées de leurs services cet automne. «Voilà ce que ces plaintes ont donné», ont-elles déclaré, tristes et amères, avant que l'état-major des Flyers change d'idée et décide de lancer de nouvelles auditions pour ramener les "Ice Girls" au sein de leur personnel. Elles devront toutefois partager le travail avec des "Ice Men". «Quand les fans des Flyers expriment leurs préoccupations, nous les écoutons», a affirmé Ike Richman, le vice-président aux relations publiques des Flyers. «Ils sont indéniablement les partisans les plus passionnés et les plus avertis dans tous les sports», a-t-il poursuivi. D'où la décision de réembaucher des "Ice Girls" car, comme le dit l'adage, "le client a toujours raison"...
Il y a un moyen bien simple pour que les fans de sports de Philadelphie évitent de conspuer à nouveau le Père Noël. C'est de leur présenter plutôt une ravissante Mère Noël de ce genre-ci (photo). En général, bien des gens, y compris des féministes moins enragées, ne s'opposent pas à la présence des "Ice Girls" dans les arénas. C'est leur uniforme qui pose problème. Non seulement parce qu'il expose leur corps comme un objet sexuel ou un trophée de chasse, mais parce qu'il est inadéquat à cause du froid qui règne sur la patinoire et à l'entrée des arénas, surtout dans les villes où l'hiver est glacial. C'est un sujet dont on n'a pas fini d'entendre parler et qui a généré plusieurs centaines de commentaires à la suite des articles de presse qui en ont traité.
Ci-dessous, un diaporama montrant les splendides "Ice Girls" des Flyers, avec comme thème musical la chanson "Philadelphia Freedom", du grand Elton John. Le populaire musicien britannique y vante l'esprit de liberté que les citoyens et citoyennes de Philadelphie ont su conserver depuis qu'il a été à l'origine de la révolution d'indépendance américaine de 1776.
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