Au moment d'effectuer la revue de l'année 2018 dans le monde du tennis professionnel féminin, l'événement qui se classe en tête de liste parmi les plus marquants est pour le moins inhabituel.
La normalité, en pareille occasion, veut que l'on souligne une performance, ou un ensemble de performances extraordinaires, de la part d'une joueuse de haut calibre s'étant particulièrement illustrée au cours des douze derniers mois. Or, cette année, les résultats des sondages et des consultations visant à déterminer le fait saillant de la saison 2018 de tennis féminin pointent vers une annonce triste : celle de la surprenante retraite d'Agnieszka Radwanska.
Une athlète spectaculaire qui ne cessait jamais de nous émerveiller par la beauté et l'ingéniosité de son jeu, à couper le souffle ! Un style personnel et des exploits qui lui ont d'ailleurs valu son surnom de Ninja Magic !
Annoncée en novembre dernier, cette retraite nous semblait prématurée de la part d'une joueuse âgée de seulement 29 ans. On savait que cette saison, elle était ennuyée par des blessures, mais c'est avec un pincement au coeur que l'inattendue mauvaise nouvelle de son retrait définitif de la compétition nous a frappés.
Dans le fond, cependant, cette retraite forcée n'aurait pas dû nous étonner autant. Pendant plus de douze années de compétition, à partir des championnats juniors de 2005-2006, Radwanska a tout donné sur les courts. Elle ne se ménageait pas non plus durant ses nombreux et durs entraînements. Son style de jeu peu orthodoxe, composé de pirouettes et de contorsions ont pu provoquer des blessures et une usure physique, notamment au niveau des articulations.
Sa marque de "commerce", illustrant ce style singulier et physiquement taxant, était ces coups qu'elle frappait en position assise, comme le montre la photo ci-dessus.
Outre sa remarquable vivacité mentale et corporelle, ou son incroyable créativité doublée d'une capacité d'improviser la rendant capable de se débrouiller et de se sortir souvent de situations difficiles ou d'impasses, Radwanska possédait ce sixième sens qui lui permettait de se dépasser et d'accomplir des jeux surréels qui semblaient sortir de nulle part. Des coups imprévus et imparables pour ses opposantes. Des jeux à l'emporte pièce qui laissaient les spectateurs ébahis et qui, une fois remis de leur stupéfaction, se mettaient à rire et à applaudir en hochant la tête en signe d'incrédulité.
Dans ces moments magiques, Agnieszka, la première Polonaise à remporter un titre de la WTA (vingt titres individuels en carrière, plus deux en double, avec des gains de près de vingt-huit millions de dollars en bourses) n'arrivait pas elle-même à expliquer le coup fumant qu'elle venait de réussir. Elle se contentait de rire de bon coeur avec les spectateurs avec, en guise de salut, sa manière caractéristique d'élever brièvement sa raquette au-dessus de sa tête avant de reprendre sa position pour le prochain jeu.
Pour elle, le terrain de tennis représentait un échiquier où ses tactiques et son talent lui faisaient placer ses coups bien maîtrisés avec précision. Toute menue, elle ne pouvait compter sur sa force brute ou sa puissance pour s'imposer comme une Serena Williams ou une Petra Kvitova. C'est plutôt par la ruse, son adresse et son patient travail de sape et de destruction méthodique qu'elle venait à bout de ses adversaires.
Côté caractère, même si elle était combative et exigeante envers elle-même, Radwanska gardait généralement son calme sur les courts. S'il lui arrivait de se fâcher après avoir commis une faute ou une erreur, elle manifestait son mécontentement par une moue typique, en se renfrognant, en plissant le nez et en tapant du pied (voir photo ci-dessus). Elle passait toutefois rapidement et facilement au jeu suivant en reprenant sa concentration. Ces sautes d'humeur passagères ne se comparaient aucunement aux crises ou aux colères noires de certaines de ses homologues sur le circuit de la WTA.
On se disait -et on souhaitait- qu'avec tous ses atouts, elle finirait bien par gagner un tournoi du Grand Chelem. Mais cela ne s'est jamais produit. Elle a néanmoins fait longtemps partie du Top 10 du classement mondial, s'élevant même jusqu'au deuxième rang en 2012, l'année de sa défaite en finale de Wimbledon. Et, à défaut de remporter les grands honneurs des tournois les plus prestigieux, Radwanska a tout de même été votée gagnante à plusieurs reprises du titre WTA de «Joueuse Favorite des Fans» de 2011 à 2016, et du meilleur coup de l'année («Shot of the Year Award») pour chacune des saisons s'étalant de 2013 à 2017. Ce n'est pas rien !
Radwanska ne comptait pas que des amies parmi les joueuses du tour de la WTA. La native de Cracovie ne craignait pas de critiquer certaines de ses rivales (dont, notamment, Maria Sharapova et Victoria Azarenka). Mais on ne pouvait qualifier ces reproches de "gratuits" ou de méchants. D'ailleurs, à l'annonce de sa retraite, il y a quelques semaines, un concert d'éloges, venant de toutes parts, a salué son départ.
Mais si par son brio et son comportement elle a fait l'unanimité chez les amateurs de tennis, les experts, les analystes ou les professionnels qui l'ont côtoyée, un incident a tout de même jeté un peu d'ombre sur sa carrière. Du moins aux yeux de certaines personnes. Des gens de son propre pays, par surcroît... D'un naturel plutôt "cool", Radwanska n'a probablement pas été si affectée que ça par cet impair, qu'elle n'a d'ailleurs jamais considéré comme tel.
Cela s'est produit en 2013 lorsque Agnieszka a posé nue pour le magazine Body Issue du réseau américain ESPN. Une querelle a alors éclaté entre elle et des groupes religieux de son pays. Ces derniers ont publiquement désapprouvé et déploré, ce qu'ils ont appelé "la conduite immorale" de leur célèbre compatriote.
Selon la championne, les personnes qui l'ont condamnée en Pologne sont incapables de faire la différence entre la pornographie des revues masculines populaires, et les photos de nudité de magazine traitant de santé et de beauté, comme celui pour lequel elle a posé. «Ils ne connaissent pas ça, ils ne sont pas encore rendus là», a-t-elle alors affirmé, en sous-entendant que la pensée des critiques religieux de son pays n'a pas assez évolué et est en retard par rapport à celle du reste du monde occidental.
Ces photos, avait précisé Radwanska, ne sont pas sexuellement explicites. Elles ne veulent que célébrer la beauté physique des athlètes, et montrer aux jeunes filles, par exemple, comment l'exercice, et de saines habitudes de vie, peuvent les rendre jolies et fortes. Elle soulignait qu'avant elle, des consoeurs de "travail", comme Serena Williams, Daniela Hantuchova et Vera Zvonareva se sont aussi laissées photographier dans leur plus simple appareil, pour la même cause. D'ailleurs, a-t-elle dit, les filles sur le circuit de la WTA (Women Tennis Association) ont toutes bien apprécié les images en questions sur Body Issue.
Un prêtre polonais, le Père Marek Dziewiecki, a appuyé cette condamnation, pour immoralité, de la joueuse de tennis "fautive" alors âgée de 25 ans, originaire de la ville de Cracovie. En colère, le religieux a stipulé que : «c'est une honte que quelqu'un qui a déclaré son amour pour Jésus fasse maintenant la promotion de la mentalité d'hommes qui considèrent la femme comme un objet plutôt que comme un enfant de Dieu digne de respect et d'amour.»
Pour sa part, Radwanska ne voyait rien de scandaleux dans cette affaire. Elle ne s'offusquait pas que des hommes aient pu acheter des copies du magazine d'ESPN (Body Issue) pour voir avant tout...son derrière dénudé ! Du moment qu'ils aient pu lire l'article qui accompagnait les photos, pour être ainsi sensibilisés à la cause de la santé et de l'importance d'être en bonne forme physique. Hummmm...pas certain que ces messieurs se soient donnés la peine d'aller plus loin que les clichés montrant les fesses d'Agnieszka...
Bon laissons cette controverse de côté et revoyons quelques-uns des coups les plus hallucinants de Ninja Magic !
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